INTERNATIONAL ALLIANCE OF WASTE PICKERS

The International Alliance of Waste Pickers is a union of waste picker organizations representing more than 460,000 workers across 34 countries
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February 02, 2012


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Mmapula Baloyi

Mmapula Bayoli au site de Temba, à Tshwane

Mmapula Baloyi ne ressemble pas  à une récupératrice aujourd’hui. Elle est élégamment habillée en venant nous accueillir toute souriante à l’intérieur du mur qui entoure Temba, le site où elle travaille, et qui arbore l’écriteau “stop nonsense wall (Arrêtez la bêtise).”

Elle est une fière récupératrice qui aime son travail : “Je travaille ici depuis dix ans et je ne me vois pas travailler ailleurs. Les gens sont sympathiques et je pense que c’est vraiment bien d’assainir  l’environnement. J’habite près d’ici aussi, alors je me rends facilement au travail. Mais je n’aime pas le triage, je préfère la cueillette.”

Mais Mmapula est plus qu’une récupératrice. Elle est bonne organisatrice et voit les lacunes et les dangers dans les conditions de travail des gens. “Le travail, dit-elle, est dur car on doit se courber très souvent et toucher des objets pointus et des substances dangereuses parfois. Une bouteille contenant un produit chimique peut exploser, et les récupérateurs attrapent l’asthme et souffrent des yeux irritables. On doit apporter ses propres gants sinon on risque de se couper gravement les doigts.”

Elle a été élue présidente du Comité des travailleurs parce qu’ils ont vite vu en elle quelqu’un qui se souciait d’eux. Comme elle le dit, « j’aurais honte si je ne les aidais pas. » Son leadership, très  apprécié au sein du Réseau des récupérateurs de Tshwane, lui a valu d’être nommée déléguée en Inde où elle s’est rendue en juin pour voir comment les collecteurs y sont organisés.

Miracle à Pune

“C’était ma première fois de monter à bord d’un avion et j’avais tellement peur.” Mais sa peur s’est vite dissipée quand elle s’est trouvée, tout comme d’autres récupérateurs venus d’ailleurs, entraînée dans le monde fascinant du recyclage des déchets aussi bien à Mumbai que dans ses alentours.

Ses hôtes indiens les ont amenés à Pune, où ils ont vu trier les déchets. En visite à un projet à gestion collective, Mmapula a vu séparer les déchets secs des déchets humides et comment ces derniers étaient transformés en compost et vendus à des gens pour leurs jardins.

De même, à Pune, alors en tournée à Malhem Engineering Company, une usine qui convertit en biogaz les déchets alimentaires reçus des hôtels, Mmapula, fascinée, a vu se dérouler le processus : une machine pressant les déchets alimentaires laisse filtrer le liquide comme engrais tandis que le reste est utilisé pour générer du biogaz capté dans un grand ballon au-dessus de la machine.

“J’ai été tellement surprise de voir qu’un légume comme le chou peut produire du gaz ! Puis, au dehors, ils nous ont montré une cuisinière à biogaz. J’ai vu un miracle, les déchets qui donnent à la fois du compost et du gaz. Cela m’a fait réfléchir.”

New Delhi – Espoir et menace

À New Delhi, les Indiens ont parlé aux visiteurs de Chintan, l’organisation qui investit l’épargne des travailleurs pour leur permettre d’envoyer leurs enfants à l’école et qui assure ainsi qu’aucun enfant ne travaille dans les décharges. Mmapula a appris aussi que les récupérateurs ont eu dix bonnes années de travail d’organisation, que le travail ne manque pas, mais qu’à mesure que les entreprises déterrent et incinèrent les déchets pour produire de l’électricité, ils se voient expulsés des décharges. Les incinérateurs peuvent employer cinq ouvriers alors que la cueillette des déchets donne du travail à beaucoup plus.

Pour faire entendre leur voix et leurs griefs,  les organisations de récupérateurs essaient de garder le contact avec les élus locaux et régionaux. Elles les encouragent aussi à rencontrer les  récupérateurs pour écouter et comprendre leurs craintes et leurs espoirs ou encore les aider dans la mesure du possible. Ces actions collectives ont, dans certains cas, porté fruit.

A Pune, Mmapula a également entendu parler de SWaCH, une organisation de récupérateurs à domicile qui font du porte-à-porte et qui permet aux collecteurs de vendre directement aux acheteurs qui veulent, par exemple, les déchets en plastique. Grâce à l’action de SWaCH, les travailleurs ont réussi à se procurer des uniformes décents.

L’Inde, une source d’inspiration

“J’aime les Indiens », commente Mmapula, « je voudrais vivre en Inde parce que les récupérateurs y sont si bien organisés. Cela me fait penser que nous devons élever nos voix et nous organiser à Tshwane. Une ONG sud-africaine vouée à la justice environnementale, groundWork, nous aide dans ce sens, mais nous ne l’avons pas écoutée, mais maintenant, venant d’Inde, je comprends que ce qu’elle nous disait est manifestement vrai.”

Mmapula a des idées qu’elle aimerait voir exploiter par les récupérateurs. Elle aimerait qu’ils fondent une organisation collective et la faire inscrire afin qu’ils puissent être reconnus officiellement, ouvrir un compte bancaire et mettre en place un régime de retraite ainsi que des programmes d’aide à l’éducation de leurs enfants.

Elle croit fermement que les récupérateurs doivent rencontrer plus souvent les autorités de la municipalité locale et les hommes politiques en haut lieu, comme le ministre des Affaires environnementales, pour faire reconnaître leur contribution, leurs besoins et leurs doléances.

“L’inspiration vient des autres. En Inde, je sais que nous y avons leur soutien moral. Mais nous manquons de connaissances. Il nous faut plus d’ateliers et de forums de discussion. Mais, sans organisation, nous ne pouvons rien faire. Le gouvernement va simplement nous demander qui vous êtes et vous venez d’où.”

Mmapula entend faire rapport au Réseau Tshwane pour voir ce que pensent les membres de son expérience indienne. « Mais tout d’abord et surtout », souligne-t-elle, « nous devons nous écouter attentivement les uns les autres. Lors des réunions tout le monde parle en même temps et part dans toutes les directions. Nous devons apprendre à bien écouter comme j’ai vu faire en Inde. »

Kally Forrester avec le traducteur Bongani Xezwi

Baloyi and Indian Waste pickers

Baloyi (derrière, à droite) en compagnie des récupératrices indiennes qu’elle admire.